Herberto Helder, reconnu par ses pairs comme le plus grand poète portugais de la seconde moitié du xxe siècle et l’une des très grandes voix de la poésie européenne contemporaine, a publié, en 1963, un ensemble de textes intitulé Os passos em volta. Depuis cette date, ces récits ironiques et ciselés, souvent bouleversants, n’ont cessé d’évoluer et d’être remaniés au gré des publications. Ce recueil rassemble 23 nouvelles, parfois longues parfois très brèves, le plus souvent à la première personne, retraçant une traversée de frontières d'un nomade parcourant l’Europe en quête de style, d’aventure et d’errance. D’Anvers à Lisbonne, de Bruxelles à Paris, le poète erre dans les rues, les bars, les gares, les chambres isolées, laissant aller son flot de pensées, ses questions et ses doutes à des circonvolutions étonnantes mais ô combien mystérieuses et humaines. «Le monde est ainsi fait, qu’est-ce que vous voulez? Il faut absolument se trouver un style. On ferait bien de placarder des grandes affiches dans les rues, de passer des annonces à la télé, au ciné. Trouvez-vous un style si vous ne voulez pas craquer. Je me suis débrouillé et je m’en suis trouvé un à force d’étudier les mathématiques et d’écouter un peu de musique. » Lyrisme, introspection et algorithmes. Ou comme si un James Joyce, un Franz Kafka et un J. D. Salinger se réunissaient à l’OuLiPo pour parler de leur dernier voyage en Europe. Plus que des «contes de la folie ordinaire», plus que des textes en prose sur les déboires d’un exilé prisonnier de ses déambulations, ce sont surtout des récits happés par le rythme et les sonorités de la poésie, en dialogue avec l’ensemble de l’œuvre poétique d’une voix qui ne cesse d’interpeller et de se métamorphoser à chaque nouvelle page.